Les terrains argileux superficiels peuvent voir leur volume varier à la suite d'une modification de leur teneur en eau, en lien avec les conditions météorologiques. Ils se « rétractent » lors des périodes de sécheresse (phénomène de « retrait ») et gonflent au retour des pluies lorsqu’ils sont de nouveau hydratés (phénomène de « gonflement »). Ces variations sont lentes, mais elles peuvent atteindre une amplitude assez importante pour endommager les bâtiments localisés sur ces terrains. Le phénomène de retrait-gonflement des argiles engendre chaque année des dégâts considérables, indemnisables au titre des catastrophes naturelles. La grande majorité des sinistres concerne les maisons individuelles.
Description du phénomène
Les terrains argileux superficiels peuvent voir leur volume varier à la suite d'une modification de leur teneur en eau, en lien avec les conditions météorologiques. En effet, ils possèdent la propriété de voir leur consistance se modifier en fonction de leur teneur en eau.
En contexte humide, un sol argileux se présente comme souple et malléable, tandis que ce même sol desséché sera dur et cassant. Des variations de volume plus ou moins conséquentes, en fonction de la structure du sol et des minéraux en présence, accompagnent ces modifications de consistance.
Ainsi, lorsque la teneur en eau augmente dans un sol argileux, on assiste à une augmentation du volume de ce sol, on parle alors de « gonflement des argiles ».
Au contraire, une baisse de la teneur en eau provoquera un phénomène inverse de rétractation ou « retrait des argiles ».
Ces variations sont lentes mais elles peuvent atteindre une amplitude assez importante pour endommager les bâtiments localisés sur ces terrains. Le phénomène de retrait-gonflement des argiles engendre chaque année des dégâts considérables, indemnisables au titre des catastrophes naturelles. La grande majorité des sinistres concerne les maisons individuelles.
Conditions d'apparition
Lors de phénomènes climatiques exceptionnels
Les phénomènes climatiques exceptionnels sont le principal facteur de déclenchement du phénomène de retrait-gonflement des sols argileux. En effet, l’amplitude des variations de volume d’un sol argileux « gonflant » augmente avec l'importance de la variation de la teneur en eau du sol. Ainsi, la succession d’une période très pluvieuse et d’une période de déficit pluviométrique constitue un facteur de déclenchement majeur.
En climat tempéré, les épisodes de sécheresse, caractérisés par des températures élevées, un déficit pluviométrique et une très forte évapotranspiration, ont pour répercussion immédiate d’assécher les sols argileux et donc de provoquer un phénomène de retrait provoquant des dégâts plus ou moins sérieux sur les bâtiments.
Lors de travaux d'aménagements
Certains travaux d'aménagement peuvent également favoriser l'apparition du phénomène de retrait-gonflement des sols argileux en :
- bouleversant les conditions naturelles d'évaporation (par exemple, les actions de drainage du sol d’un terrain, de pompage, de plantations, d’imperméabilisation des sols) ;
- perturbant l’état hydrique du sous-sol (par exemple, une fuite, voire la rupture d’un réseau enterré ou une infiltration d’eaux pluviales) ;
- aggravant la dessiccation du sous-sol (par exemple, des sources de chaleur près d’un mur insuffisamment isolé).
Les argiles, des matériaux aux propriétés plastiques particulières
Observées au microscope, les argiles apparaissent sous forme de plaquettes superposées. On parle de structure minéralogique en feuillets. L’espace entre les différentes couches ou feuillets de minéraux peut accueillir de l’eau et des ions conférant aux argiles leurs propriétés de dilatation et rétractation. On distingue trois familles d’argiles, en fonction de l’épaisseur des feuillets, de leurs minéraux constitutifs et de la distance inter-feuillets.
Un matériau argileux a une consistance variable selon la teneur en eau du sol. Dur et cassant lorsqu’il est sec, il devient meuble à partir d’un certain degré d’humidité. Ces modifications de consistance s’accompagnent également de variations de volume dont l’amplitude peut être parfois spectaculaire. La plasticité de l’argile dépend des minéraux qui la constituent.
Toutes les familles de minéraux argileux ne présentent pas la même prédisposition au phénomène de retrait-gonflement. La smectite, la vermiculite et la montmorillonite sont des minéraux dits sensibles, du fait de leur potentiel de déformation élevé. L’illite et la kaolonite sont caractérisées par un potentiel de déformation plus faible.
Facteurs de prédisposition
Les facteurs de prédisposition sont de nature à induire le phénomène de retrait-gonflement des argiles, mais ne suffisent pas à le déclencher. Parmi les facteurs de prédisposition au phénomène de retrait-gonflement des argiles, on distingue la nature du sol et le contexte hydrogéologique.
Nature du sol
La nature du sol est le facteur de prédisposition prépondérant à l'apparition du phénomène de retrait-gonflement des argiles. En effet, seules les formations géologiques renfermant des minéraux argileux sont a priori concernées. Ensuite, la probabilité de survenue du phénomène dans les formations argileuses est fonction de :
• la proportion de matériaux argileux au sein de la formation ;
• la proportion de minéraux argileux favorables ;
• la profondeur et de l'épaisseur de la formation.
Contexte hydrogéologique
La présence d'une nappe phréatique à faible profondeur et des circulations saisonnières d'eaux souterraines à profondeur relativement faible constituent également des facteurs de prédisposition. En effet, elles peuvent être à l’origine de fréquentes variations de teneur en eau des sols et ainsi favoriser le phénomène de retrait-gonflement.
Effets & conséquences
Manifestations des désordres
Les mouvements de terrain induits par le retrait et le gonflement des argiles se traduisent principalement par des fissurations en façade des habitations, souvent obliques, et passant par les points de faiblesse que constituent les ouvertures.
Les désordres se manifestent aussi par des décollements entre éléments jointifs (garages, perrons, terrasses), ainsi que par une distorsion des portes et fenêtres, une dislocation des dallages et des cloisons et, parfois, la rupture de canalisations enterrées (ce qui vient aggraver les désordres car les fuites d’eau qui en résultent provoquent des gonflements localisés).
Les désordres survenant pendant une sécheresse intense sont dus aux tassements différentiels du sol de fondation, pouvant atteindre plusieurs centimètres. Ils résultent des fortes différences de teneur en eau au droit des façades (zone de transition entre le sol exposé à l’évaporation et celui qui en est protégé) et, le cas échéant, de la végétation proche. L’hétérogénéité des mouvements entre deux points de la structure va conduire à une déformation pouvant entraîner la fissuration, voire la rupture de la structure. La réponse du bâtiment sera fonction de ses possibilités de déformation.
Vulnérabilité de l'habitat individuel
Les constructions les plus vulnérables sont les maisons individuelles. Plusieurs raisons expliquent l'incapacité de ce type d'habitat à supporter les distorsions générées par le mouvement du sol provoqué par le retrait-gonflement des argiles :
• la structure des bâtiments, légère et peu rigide ;
• des fondations souvent superficielles (en comparaison à celles des immeubles collectifs) ;
• l'absence, dans la plupart des cas, d’une étude géotechnique préalable qui permet notamment d’identifier la présence éventuelle d’argile gonflante et de concevoir le bâtiment en prenant en compte le risque associé.
La construction sinistrée caractéristique est ainsi une habitation individuelle de plain-pied reposant sur des fondations inadaptées et avec présence d'arbres à proximité. Les maisons construites sur des terrains en pente ou un sous-sol partiel, dont les fondations présentent des différences d’ancrage d’un point à un autre de la structure, sont encore plus sensibles.
Un phénomène aux conséquences coûteuses
Depuis la vague de sécheresse des années 1989-91, le phénomène de retrait-gonflement (mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols) a été intégré au régime des catastrophes naturelles (dit « Cat Nat »). À ce titre, les dommages qui lui sont attribués sont susceptibles d'être indemnisés par les assureurs. Depuis 2016, les sécheresses de grande ampleur se succèdent et la sinistralité connaît une forte croissance : la charge annuelle moyenne du régime Cat Nat s’élève à environ 1 Md€ contre 400 M€ sur la période 1989-2015. Sur les 8 années de sécheresse les plus coûteuses entre 1989 et 2022, 6 ont eu lieu entre 2016 et 2022.
L’année 2022 a été marquée par une sinistralité sécheresse record à 3,5 Md€, soit près d’1 Md€ de plus que lors du précédent record enregistré en 2003. La sécheresse représente une part croissante de la sinistralité Cat Nat : 60 % sur la période 2016-2022 contre 37 % sur la période 1989-2015.
Estimé à 16 500 €, le coût moyen d'un sinistre lié au retrait-gonflement des argiles (RGA) sur une maison individuelle consécutif au phénomène de retrait-gonflement est le plus élevé des garanties dommages.
Derrière ce coût moyen, les coûts d'intervention peuvent s’avérer très variables en fonction des situations.
Dans certains cas, la cause principale des désordres (par exemple, un arbre trop proche) peut être supprimée à moindre frais et les fissures rebouchées avec un enduit souple dès lors que l’état hydrique du sol a retrouvé son équilibre.
Dans de nombreux cas cependant, des reprises en sous-œuvre (micro-pieux, injections de résines) sont nécessaires. Les coûts d'intervention peuvent alors se chiffrer à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Enfin, dans les rares cas extrêmes où le coût de confortement dépasse la valeur de la construction, des démolitions peuvent avoir lieu.
Impact du changement climatique
Outre l’exposition liée à la présence d’argile, le phénomène dépend également du facteur météorologique : la succession d’épisodes météorologiques de sécheresse prolongée, combinés à des températures élevées et alternant avec des pluies soutenues, a notamment un effet déstabilisateur accru. Il est anticipé que le changement climatique pourrait conduire pour certains sites à des mouvements du sol plus en profondeur qu’actuellement.
Les dernières projections réalisées par la Caisse centrale de réassurance (CCR) tablent sur une augmentation de 44 % à 162 % de la sinistralité due au retrait-gonflement des argiles d’ici 2050, en fonction des scénarios climatiques du groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). La prise en compte du changement climatique passera donc par une politique d’adaptation du bâti (mises en œuvre de dispositions constructives et mesures de remédiation) afin de réduire les taux de sinistralité sur les constructions neuves et sur le stock.
En 2019, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a mené un travail d’actualisation des cartes d’aléa existantes sur la base de l’évolution des connaissances en la matière, dont les données géolocalisées de sinistralité afin d’obtenir une carte d’exposition des formations argileuses au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols. Cette carte est désormais réglementaire (voir point 3 sur la cartographie).
Cette carte comporte quatre zones : les zones non argileuses et les zones d’exposition faible, moyenne et forte.
48 % du territoire ressort ainsi comme exposé au retrait-gonflement des argiles (RGA) à des niveaux moyens et forts, et d’après les dernières statistiques (source : Cartographie de l’exposition des maisons individuelles au retrait gonflement des argiles, MTE/CGEDD/SDS, 2021) disponibles sur l’implantation des maisons individuelles en zone d’exposition au RGA (2021), 54 %, soit 10 millions de maisons individuelles, se trouvent en zones d’exposition moyenne ou forte. La carte d’exposition remplace l'ancienne carte d'aléa (publiée entre 2001 et 2020) et requalifie l’exposition de certains territoires au phénomène de retrait-gonflement des sols argileux. Elle a été mise au point à partir de deux sources de données :
- la carte de susceptibilité réalisée par le BRGM à l’issue du programme de cartographie départementale de l’aléa retrait-gonflement des argiles conduit de 1997 à 2010 ;
- les données actualisées et homogénéisées de la sinistralité observée (sinistres indemnisés au titre de la garantie Cat Nat « sécheresse »), collectées par la Mission Risques Naturels (MRN) sur la période 1989 – 2017.
Susceptibilité du territoire au phénomène
La cartographie de la susceptibilité du territoire au phénomène de retrait-gonflement des sols argileux utilisée pour réaliser la carte d'exposition permet d'identifier les formations argileuses a priori sujettes au phénomène de retrait-gonflement et de les hiérarchiser selon un degré de susceptibilité croissant.
Elle a été mise au point à partir d'une analyse des cartes géologiques de la France au 1/50 000, qui a permis d’identifier plus de 2 000 formations argileuses affleurantes ou sub-affleurantes.
Ces formations ont ensuite été réparties en trois classes de susceptibilité croissante (faible, moyenne et forte), définies par la somme de trois critères de caractérisation des formations :
- leur nature lithologique : proportion d'argiles, épaisseur et continuité des couches ;
- leur composition minéralogique : composition des argiles en minéraux plus ou moins sensibles ;
- leur comportement géotechnique : propriétés mécaniques.
Sinistralité observée
Les données de la sinistralité observée utilisées pour réaliser la carte d'exposition du territoire au phénomène de retrait-gonflement des sols argileux sont issues de la base des Sinistres Indemnisés Liés aux Evènements Climatiques (SILECC) de la Mission Risques Naturels.
Cette base, représentative d'environ 70 % du marché de l'assurance, recense près de 180 000 sinistres indemnisés au titre de la garantie Cat Nat "sécheresse" sur la période 1989-2017. Elle a servi de base au calcul de la densité de sinistres par formation argileuse dans les zones urbanisées et à la hiérarchisation de celles-ci selon un degré de sinistralité croissant :
- sinistralité faible = densité de sinistre au km² urbanisé inférieure à 2 ;
- sinistralité moyenne = densité de sinistre au km² urbanisé comprise entre 2 et 10 ;
- sinistralité forte = densité de sinistre au km² urbanisé supérieure à 10.
Pour prendre en compte les 18 000 sinistres recensés hors zone argileuse (9 % du total), un tampon de 100 mètres autour de chaque formation argileuse a été appliqué, puis les sinistres ont été rattachés à la formation argileuse la plus proche (dans le périmètre du tampon). Cette méthode a permis de rattacher 5 % des sinistres survenus hors zone argileuse à des zones d'exposition moyenne ou forte. Au final, il est observé que 93 % des sinistres recensés sont survenus dans des zones d'exposition moyenne (38 %) ou forte (55 %).
Cartographie de l'exposition au phénomène : 10 millions de maisons individuelles exposées
La carte d’exposition du territoire au phénomène de retrait-gonflement des argiles a pour but d’identifier les zones exposées au phénomène où s’appliqueront les dispositions réglementaires introduites par l'article 68 de la loi ELAN (voir partie 4). Cette carte a donc une portée réglementaire.
La carte hiérarchise les zones exposées selon un degré d'exposition croissant : faible, moyen et fort. Le degré d'exposition des zones au phénomène de retrait-gonflement est le produit de leur susceptibilité et de la sinistralité effectivement observée :
- exposition faible =
o susceptibilité faible x sinistralité faible ;
- exposition moyenne =
o susceptibilité faible x sinistralité moyenne ou forte ;
o susceptibilité moyenne x sinistralité faible ou moyenne ;
- exposition forte =
o susceptibilité moyenne x sinistralité forte ;
o susceptibilité forte x sinistralité faible ou moyenne ou forte.
Échelle de validité de la carte d'exposition
La carte d’exposition ainsi élaborée reflète l’état des connaissances au moment de sa publication. Par ailleurs, l’échelle de validité de la carte d'exposition est celle de la donnée de base utilisée pour la réalisation de la carte de susceptibilité, à savoir les cartes géologiques à l’échelle 1/50 000. Ainsi, la carte d’exposition ne peut en aucun cas représenter en tout point l’exacte nature des terrains présents en surface ou sub-surface :
- en particulier il n'est pas exclu que, sur les secteurs considérés hors zone argileuse (qui sont présentés sans figuré spécifique sur les cartes d’aléa), se trouvent localement des zones argileuses d’extension limitée. Celles-ci peuvent être liées à l’altération localisée des calcaires, à des lentilles argileuses intercalées ou à des placages argileux non cartographiés, correspondant notamment à des amas glissés en pied de pente. A l’échelle de la parcelle constructible, elles sont en tout cas de nature à provoquer des sinistres isolés ;
- inversement, il est possible que, localement, certaines parcelles situées pourtant dans un secteur dont la susceptibilité au retrait-gonflement des argiles a été évaluée globalement comme non nulle (faible, moyenne ou forte) soient en réalité constituées de terrains non sensibles au phénomène, voire non argileux. Ceci pourra être mis en évidence à l'occasion d'investigations géotechniques spécifiques, par exemple en prévision d'un nouveau projet d'aménagement (d'où l'intérêt des études de sols avant construction).
Réglementation
Instauration de dispositions constructives : mesures issues de la loi ELAN
Pour protéger les maisons construites dans une zone d’exposition moyenne ou forte et réduire le nombre de sinistres, des dispositions constructives visant à réduire les désordres liés au retrait-gonflement des argiles ont été introduits dans le cadre législatif (article 68 de la loi ELAN) et réglementaire.
Ainsi, en application de l’article 68 de la loi Elan, le décret du Conseil d’Etat n°2019-495 du 22 mai 2019, modifié par le décret n° 2021-872 du 30 juin 2021, a créé une section du Code de la construction et de l’habitation (articles R. 132-3 à R. 132-8) spécifiquement consacrée à la prévention des risques de mouvements de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols. L’objectif de cette mesure réglementaire est de réduire le nombre de sinistres liés à ce phénomène en imposant la réalisation d’études de sol préalablement à la construction dans les zones exposées au retrait-gonflement des argiles et la mise en œuvre de techniques particulières de construction.
La carte d’exposition identifie les zones exposées au phénomène de retrait-gonflement des argiles où s’appliquent les nouvelles dispositions réglementaires (zones d’exposition moyenne et forte).
L'arrêté ministériel du 22 juillet 2020 donne une portée réglementaire au zonage issu de la carte d'exposition publiée depuis janvier 2020 sur Géorisques.
Les articles R. 132-3 à 132-8 du Code de la construction et de l’habitation imposent dans les zones d’exposition moyenne ou forte au retrait-gonflement des argiles :
- à la vente d'un terrain constructible : le vendeur a l'obligation de faire réaliser une étude préalable lié à ce phénomène ;
- lors de la construction de la maison : le maitre d’ouvrage à le choix soit de suivre les techniques particulières de construction édictées par voie réglementaire ou soit de suivre les techniques particulières de construction définies dans l’étude géotechniques de conception quand celle-ci a été réalisée.
L’article R. 112-10 du Code de la construction et de l’habitation définit les objectifs des techniques constructives à appliquer pour les constructions en zones d’exposition moyenne ou forte au retrait-gonflement des argiles. Ces techniques particulières sont définies par arrêté ministériel.
L’arrêté ministériel du 22 juillet 2020 définit le contenu des études géotechniques à réaliser dans les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols :
- l’étude géotechnique préalable permet une première identification des risques géotechniques d’un site. Elle doit fournir un modèle géologique préliminaire et les principales caractéristiques géotechniques du site ainsi que les principes généraux de construction pour se prémunir du risque de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols ;
- l’étude géotechnique de conception prenant en compte l’implantation et les caractéristiques du bâtiment, a pour objet de fixer les prescriptions constructives adaptées à la nature du sol et au projet de construction, en tenant compte des recommandations énoncées lors de l’étude géotechnique préalable.
L’arrêté du 22 juillet 2020, définit les techniques particulières de construction dans les zones exposées au phénomène de mouvement de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols :
- Les bâtiments en maçonnerie ou en béton doivent être construits avec une structure rigide. La mise en œuvre de chaînages horizontaux et verticaux, ainsi que la pose de linteaux au-dessus des ouvertures permet de répondre à cette exigence.
- Pour tous les bâtiments :
- Les déformations des ouvrages sont limitées par la mise en place de fondations renforcées et suffisamment profondes pour s'affranchir de la zone superficielle où le sol est sensible au phénomène de mouvement de terrain différentiel, soit a minima 1,20 m en zone d'exposition forte, ou de 0,80 m en zone d'exposition moyenne.
- Les variations de teneur en eau du terrain à proximité de l'ouvrage dues aux apports d'eaux pluviales et de ruissellement et à l'action de la végétation doivent être limitées.
Toutes ces dispositions sont codifiées dans le Code de la construction et de l'habitation (CCH), notamment : L.132-4 à L. 132-9 et R. 132-3 à R. 132-8. Une plaquette de communication à destination du public a été réalisée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Cette plaquette présente de manière synthétique l’ensemble du dispositif mis en place.
Contrôle des règles de constructions
Le contrôle des règles de construction est renforcé depuis le 1er janvier 2024 (décrets pris en application de l'ordonnance n° 2022-1076 du 29 juillet 2022). Le décret (n° 2023-1173) - pris en application des articles L.122-8, L.122-11 et L.122-14 du CCH - définit le cadre réglementaire relatif au respect des règles de constructions dans le champ des risques (risque "retrait gonflement des argiles", risque sismique).
L’arrêté du 21 décembre 2023 créée une nouvelle attestation relative aux RGA, exigée au moment de l'achèvement des travaux dans les zones d’exposition moyenne ou forte soumises à la réglementation "RGA". Toutes ces dispositions sont codifiées dans le CCH, notamment : L.122-7 à L. 122-14 et R. 112-22 à R. 112-38.
Plan de prévention des risques (PPR)
Un PPR retrait-gonflement des argiles a pour objectif de :
- délimiter, à l’échelle communale, les zones exposées au phénomène de retrait-gonflement des argiles ;
- rendre obligatoire des prescriptions permettant de diminuer le risque pour les projets de construction et pour les biens et activités existants dans les zones exposées.
Certaines communes sont couvertes par des PPR retrait-gonflement des argiles qui ont été réalisés avant la mise en œuvre de la loi ELAN. Aujourd’hui, la loi ELAN ayant la même efficacité qu'un PPR pour les constructions neuves, la réalisation de nouveaux PPR argile ne présente plus d’intérêt.
Modalités de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle consécutive à la sécheresse et à la réhydratation des sols argileux
Le retrait-gonflement des argiles (RGA) est une cause importante de sinistres en France. Les dégâts provoqués par ce phénomène sont couverts par le dispositif d’indemnisation des catastrophes naturelles (dit « Cat Nat »). L’état de catastrophe naturelle d'une commune est reconnu par arrêté des ministres chargés de l’intérieur et des finances, au regard de l'intensité anormale de l'agent naturel à l'origine des dégâts.
Plusieurs évolutions ont été apportées par le Gouvernement pour adapter le régime des catastrophes naturelles pour cet aléa :
- La loi du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles, progressivement mise en vigueur depuis le 1er janvier 2023, améliore la transparence de la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, favorise une indemnisation meilleure et plus rapide des sinistrés et renforce les efforts de prévention face à ces phénomènes.
- L’ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols, publiée le 9 février 2023, contribue également à une meilleure prise en charge de ses conséquences pour des millions d’occupants de maisons individuelles construites avant 2020.
- La circulaire du 29 avril 2024 relative à la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle met à jour la circulaire du 10 mai 2019 et intègre de nouveaux critères de reconnaissance :
- la période de retour passe de 25 ans à 10 ans, pour reconnaître, et donc indemniser, plus de communes ;
- les communes peuvent désormais être reconnues en cas de succession anormale de sécheresses significatives, et pas uniquement d’une seule sécheresse anormale ;
- les communes adjacentes aux communes reconnues sont désormais prises en compte elles aussi.
Cette circulaire s’applique aux épisodes de sécheresse éligibles survenus depuis le 1er janvier 2024. Cette circulaire actualisée, consolide par ailleurs et regroupe en un seul document l’ensemble des procédures de reconnaissance, règles d’instruction et modalités de recours et de réexamen portant sur des arrêtés de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, jusqu’à présent réparties dans une succession de circulaires publiées au fil du temps.
Si les dégâts provoqués par le phénomène de retrait-gonflement des argiles sont coûteux et pénibles à vivre pour les propriétaires, la construction sur des sols argileux n'est en revanche pas impossible. En effet, des mesures préventives simples peuvent être prises afin de construire une maison en toute sécurité.
La prise en compte de la sensibilité du sol au phénomène de retrait-gonflement est essentielle pour maîtriser le risque. C'est le sens des dispositions de la loi ELAN, qui prévoit la réalisation d'études géotechniques pour identifier avant toute construction la présence éventuelle d’argile gonflante au droit de la parcelle ou encore prévoir des dispositions relatives à la profondeur des fondations.
L’ensemble de ces mesures de prévention ne règle cependant pas le cas des maisons construites antérieurement à 2018, dans des zones exposées au RGA et qui sont déjà fragilisées ou sont susceptibles de subir des dommages graves dans le futur. Pour ces maisons, des expérimentations et des recherches à même d’identifier des mesures de remédiation efficaces font l’objet d’études approfondies. Elles viseront à renforcer la résilience du bâti existant en agissant plus directement en amont sur les causes et les variations en eau du sol.
Mesures préventives pour les nouvelles constructions
En complément des dispositions constructives réglementaires en vigueur depuis 2020, d’autres mesures préventives sont généralement prescrites pour construire sur un sol argileux sujet au phénomène de retrait-gonflement et obéissent aux principes ci-dessous. La mise en application de ces principes peut se faire selon plusieurs techniques différentes dont le choix reste de la responsabilité du constructeur, pour celles non imposées par la réglementation.
Mesures de remédiation pour le bâti existant
Il existe principalement deux familles de solution de remédiation pertinentes dans la lutte contre les dommages dus au RGA :
- les solutions dites « verticales » (renforcement par chainage dans la maçonnerie, injection de résine sous-fondations, reprise en sous-oeuvre) qui visent à reprendre ou renforcer les fondations pour rendre la maison robuste face au RGA : ces solutions correspondent à des travaux relativement lourds et couteux (environ 44 000 € pouvant aller jusqu’à 76 000 €) et ne sont pas adaptées à toutes les situations. Elles sont souvent retenues pour la réparation de dommages importants qui imposent un relogement pendant 12 à 24 mois le temps de stabiliser la construction sur une saison ;
- les solutions dites « horizontales » qui ont pour but de maîtriser les variations de l’hygrométrie autour de la maison (par des écrans racinaires, la mise en place d’une bordure imperméable autour de la maison, la maîtrise des écoulements…). Elles sont jusqu’à présent plutôt utilisées lorsqu’une première fissuration est constatée.
Compte tenu de la forte sinistralité liée au RGA et de la faible maturité des solutions de remédiation, notamment avant sinistre, un appel à projet a été lancé dans le cadre de France 2030 pour tester des solutions horizontales et verticales en situation réelle : plusieurs projets ont été sélectionnés dans le cadre de cet appel à projets. Parmi ceux-ci, la CCR, France Assureurs et la Mission Risques Naturels ont annoncé fin 2022 une « initiative sécheresse » sur une durée de 5 ans, qui a vocation à créer une base commune et partagée entre les acteurs assurantiels de mesure de l’efficacité comparée des solutions RGA (horizontales et verticales) sur 300 habitations.
- Site internet de l’Agence Qualité construction (AQC)
- Site internet de la Mission Risques Naturels (MRN)
- Site internet CCR
- Site internet Infoterre du BRGM
- Le phénomène de de retrait-gonflement des sols argileux sur le site internet du CEREMA
- Publication de la cour des comptes – février 2022 : Sols argileux et catastrophes naturelles
- Site internet du MTECT - Construction, rénovation et réglementation du bâtiment
- Site internet du MTECT - Risques naturels
Pour en savoir plus :
- La fiche technique « Construire en terrain argileux» du Ministère en charge de l'environnement
- La fiche « Mouvements de fondations de maisons individuelles, 2e partie : mouvements exceptionnels en sols sensibles », rédigé par l’Agence Qualité Construction (AQC)
- Le rapport méthodologique « Diagnostic pour l’adaptation des habitations au retrait gonflement des argiles avant dommages », rédigé par la Mission Risques Naturels (MRN)
- Le guide « RGA – protéger sa maison de la sécheresse – conseils aux constructeurs de maisons neuves » rédigé par l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux élaboré par l'Université Gustave Eiffel)
- Le guide "Retrait et gonflement des argiles - Caractériser un site pour la construction" élaboré par l’Université Gustave Eiffel et Armines
- Le guide "Retrait et gonflement des argiles - Analyse et traitement des désordres créés par la sécheresse" élaboré par l’Université Gustave Eiffel et l’Ineris